Il y a quelque chose de fascinant, presque vertigineux, dans l'idée de se voir comme l’impermanence elle-même. C'est comme si, au lieu de simplement constater que tout change autour de nous, on devenait cette danse fluide qui ne s'arrête jamais. Être l’impermanence, ce n'est plus simplement vieillir, perdre des choses ou en découvrir d'autres – c'est vivre chaque instant comme un mouvement infini, sans attache, sans regret, sans espoir de figer quoi que ce soit.
Je suis l'impermanence. Pas juste un être de chair et d'os qui vieillit. Pas seulement un ensemble de pensées et de souvenirs qui s'accumulent ou s’effacent. Non, je suis cet état de mouvement, cette dynamique incessante, ce flot de transformations qui traversent le monde et le façonnent. En me percevant comme l'impermanence, je m’éloigne du besoin de contrôle, de cette envie de figer les choses pour leur donner une apparente stabilité. Car en réalité, rien ne reste en place. Et au fond, je sais que c’est là toute la beauté de l’existence.
Quand je dis "je suis l'impermanence", je reconnais que chaque moment qui passe est à la fois une naissance et une mort, un instant où quelque chose de nouveau prend vie et un autre qui s’éteint. Chaque souffle que je prends me rappelle ce lien intime avec le mouvement de la vie. Rien ne s’arrête, tout se transforme – et je suis ce rythme. Que je le veuille ou non, je fais partie de ce grand cycle, de cette danse où rien ne peut être possédé, où tout nous échappe dès qu’on essaie de l’attraper.
Ça peut sembler effrayant, cette idée de ne rien retenir, de ne rien posséder véritablement. Mais au lieu de fuir ce constat, au lieu de me perdre dans la course à la stabilité ou dans l'illusion de la permanence, je choisis de me laisser emporter par ce flot. Je ne suis pas un rocher immobile au milieu de la rivière. Non, je suis l'eau elle-même, glissant entre les pierres, me faufilant, contournant, emportant avec moi ce que je rencontre sans jamais m’arrêter.
En acceptant d’être l’impermanence, je trouve une forme de paix. Car en lâchant prise, je cesse de me battre contre le temps. Je deviens un observateur attentif, capable d’accueillir chaque instant pour ce qu’il est, sans en attendre autre chose. C’est comme si, en renonçant à l’envie de retenir, je me libérais moi-même de cette sensation d’inachevé, de ce manque qui nous guette quand on espère que quelque chose durera.
Alors, je me permets d’être ce passage, cette transition. Être l'impermanence, c’est aussi accepter toutes les versions de moi qui se sont succédées et toutes celles qui viendront. Celles qui ont rêvé, celles qui ont eu peur, celles qui ont aimé, celles qui ont souffert, celles qui ont espéré. Toutes sont passées, toutes passent, toutes se transforment, et elles laissent chacune une trace, un souvenir, un fragment d’expérience.
Et cette impermanence me rappelle une chose essentielle : rien n’est figé, rien n’est perdu. Tant que je suis en mouvement, je continue de créer, de vivre, d’apprendre. Je laisse une empreinte, même éphémère, et c’est en acceptant ce caractère temporaire que je me connecte pleinement à ce qui est là, maintenant.
La vie est une scène où chaque personnage, chaque rencontre, chaque lieu, n’est qu’un passage. Alors pourquoi s’accrocher ? Pourquoi ne pas s’ouvrir à ce flot continu de l’existence, à ce jeu de la vie où rien n’est immuable, où tout est en perpétuelle évolution ?
Je suis l'impermanence, et dans cette réalisation, je me trouve.
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